J’ai fait aujourd’hui un reportage sur les surfers derrière habitat 67 pour le compte de l’agence France Presse. Voici l’excellent texte du journaliste Clément Sabourin et quelques unes de mes photos un peu plus haut.
Le coffre de la voiture ouvert, une jolie brune enfile sa combinaison intégrale tandis que son ami enduit leurs planches d’une cire destinée à éviter de déraper. Il y a encore sept ans, tous deux seraient passés pour des allumés.
Aujourd’hui, une telle scène n’étonne plus grand monde et les résidents du futuriste immeuble voisin ne s’irritent même plus du fait que leurs places de stationnement soient “squattées” par ces hordes de surfeurs.
Ils préfèrent plutôt admirer de leur jardin ou du haut de leur balcon les acrobaties des surfeurs qui se succèdent sans interruption sur la vague d’environ 1,5 mètre de haut.
“Ça devient de plus en plus populaire, il y a toujours plus de monde: le week-end il faut parfois attendre 45 minutes pour prendre la vague… c’est pour ça qu’on essaie de garder ça le moins populaire possible… faut que ça reste secret!”, lance Simon Rouleau, un Montréalais de 24 ans. A la différence des vagues de mer ou de celles provoquées par les brusques élévations des fleuves – comme sur la Gironde, en France, ou sur l’Amazone, au Brésil – les vagues de rivières sont présentes en permanence, car uniquement formées par l’irrégularité des fonds.
Et de Munich à Genève en passant par Turin et Lyon, le nombre de nouveaux adeptes a explosé ces cinq dernières années.
“A Montréal c’est incroyable, la vague est tout le temps là!”, dit à l’AFP Corran Addison, véritable pionnier du Saint-Laurent. Ce Sud-africain, trois fois champion du monde de kayak free style, fut en effet le premier à avoir dompté le majestueux fleuve avec sa planche, en 2002. C’est d’ailleurs pour profiter de cette vague 365 jours par an, y compris en hiver quand des plaques de glace dérivent dans l’eau à 4 degrés, qu’il a décidé de s’installer à Montréal.
“Je me lève le matin et je n’ai pas besoin de penser aux marées, aux orages, à la météo… si j’ai envie de surfer, je vais surfer… la vague est là!”, ajoute le quadra. Après avoir converti quelques amis à cette nouvelle discipline, Addison a décidé d’en faire la promotion à grande échelle, notamment en lançant en 2004 une école de surf. Une deuxième école, concurrente, a ouvert dans la foulée et plus de 2.000 élèves sont désormais formés chaque année.
S’il y a donc beaucoup de novices parmi les 500 surfeurs réguliers recensés dans la métropole québécoise, on compte également un certain nombre de surfeurs aguerris en mal d’océan. C’est le cas de Robert Smyth, un Australien de 59 ans dont la planche prenait la poussière depuis son arrivée au Canada en 1972: “Quand j’étais jeune je surfais en Australie sur les longboards… là c’est vraiment différent mais j’ai beaucoup de plaisir”. Ce natif de Sydney apprécie notamment l’absence d’effort physique pour se présenter à la vague: il suffit en effet de se laisser dériver avec le courant, de placer sa planche le nez vers l’amont, puis de se lever tranquillement.
“Je n’ai même pas besoin de ramer… ce que je suis trop vieux à faire”, plaisante ce moustachu, un casque sur la tête afin de prévenir les contacts avec les roches saillantes. Le surf de rivière requiert en effet un équipement spécifique, à commencer par des planches plus solides que celles utilisées en mer… Ce marché naissant est cependant délaissé par les grands groupes de glisse, au grand bonheur de Conrad Addison qui a créé sa propre marque: 2imagine.
Cette année, 1.000 planches de surf “Made in Montréal” ont ainsi été vendues dans le monde entier.